«
Rester, c’est exister : mais voyager, c’est vivre. » - G. NADAUD
Aventure péruvienne :
rebondissements et acclimatation
Mi-juillet
2013, l'idée de repartir en voyage se faisait de plus en plus présente dans ma tète.
Recherches ici et là afin de prévoir un départ au début de septembre. Mon choix
s'arrêta sur le nord du Pérou et ses Lagunas. Je décidai de faire le trek de 10
jours de la Cordillera Huayhuash. Après quelques soirées passées dans les
livres et sur Internet, je réservai avec une petite compagnie locale et
familiale.
29 août 2013 : jour du grand départ. Montréal - Mexico - Lima. À
l'aéroport de Mexico, j'entendis, avec l’accent espagnol, un nom ressemblant un
peu trop au mien... Que
passa ? Pourquoi
m'appellait-on ? " Sorry Miss, we don't know where is your luggages in
the Airport. You will have it tomorrow evening within the next
flight..." Demain ?
Euh non... Impossible... !! (Je prenais le bus vers Huaraz le lendemain matin
et disons qu'avec mon itinéraire réglé jour par jour, j'avais besoin d'arriver à
temps pour m'acclimater avant mon trek où je serais 10 jours entre 4000 et 5100
m !) La panique s'empara un peu de moi… mais après 1 heure, j'optai plutôt pour
l'option que ça faisait partie de l'aventure et que finalement, ma panique ne
réglerait absolument rien. Arrivée à Lima, j’ai appris que mes bagages
arriveraient finalement le lendemain matin vers 7h… Je devais prendre le bus à
9h30… J'essayai de me détendre cette nuit-là mais sans mes trucs, la nuit ne
fut pas tellement reposante. Morale de cette petite mésaventure : toujours
prévoir quelques items dans son bagage de cabine !
Lendemain matin, je me promenai d'un comptoir à l'autre à l'aéroport et finalement,
coup de chance : je réussis à avoir mon bagage vers 7:50. Mon taxi fila en
vitesse jusqu'au terminus de bus et j'arrivai à 8:50. Tout était maintenant sous
contrôle, je partais, comme prévu, en bus vers Huaraz à 9:30. Arrivée vers
17:30, j'étais crevée par ces 2 jours de transport. Mon guide, Lina, vint à ma
rencontre pour m'expliquer notre parcours pour le trek. On se dit ensuite " à
demain " pour aller se promener et commencer mon acclimatation.
Lors du petit déjeuner, je fis la connaissance d'un couple québécois très sympa
qui avait décidé de partir découvrir le monde pendant la prochaine année. Il
eut une chimie dès le départ avec eux et même s'ils n'étaient pas partis pour
faire un trek de plusieurs jours, mon projet les intrigua. Parle parle, jase
jase, ils rencontrèrent Lina et son père avec moi et parle parle, jase jase
encore, voilà qu’ils étaient convaincus et décidèrent de se joindre à moi pour
cette aventure !
Après tous ces rebondissements, ma première journée de vacances commença :
un ciel bleu, sans nuage, soleil radieux et plombant. Nous avons été au Laguna
Chinancocha. Ce n'est pas vraiment une rando car pour s'y rendre, il faut y
aller en "collectivo" (bus public) et ensuite en taxi qui nous dépose
tout près du lac. Nous nous baladâmes autour du lac, sur un sentier plat, juché
à 3 850 m. Un superbe lac toutefois, entouré d'arbres différents de ce que j'ai
vu à date dans ma vie, plusieurs dans des tons orangés qui captèrent toute mon
attention. Les « clics » de mon appareil photo se fessaient
entendre ici et là. Déjà, je sentais que
j'avais fait un bon choix de destination ! Au retour de notre ballade, notre
taxi n'y était plus. Nous avions payé la moitié du montant, pour se retrouver
pantois et sans transport pour le retour où nous devions reprendre le
collectivo pour revenir à Huaraz. Tant bien que mal, nous avons réussi à
trouver de la place dans un petit bus privé (par chance car nous étions au
milieu de nulle part !)
2ième journée d'acclimatation : le Laguna Churup. Un ciel toujours aussi bleu, un
soleil chaud, rayonnant qui annonçait une très belle journée ! Mes nouveaux compagnons, étant à Huaraz depuis déjà quelques jours et mieux
acclimatés que moi, décidèrent de se reposer et de magasiner afin d’avoir tout
ce qu'il fallait pour le trek. Je partis donc seule en taxi vers Pitec (3 850
m) où commença ma 1re vraie rando péruvienne !!!! Le sentier était très facile
à suivre, aucune balise n'indiquant le chemin. Chemin qui est un mélange de
terre et de roches de toutes les grandeurs. La terre s'estompant par endroits
et le sentier se couvrant davantage de roches. La montée était plutôt graduelle,
rien de technique mais j'avais le souffle court et je buvais beaucoup d’eau tout
au long de la 1re heure. Après une montée un peu plus prononcée, le sentier devint
plat et plus terreux. Mes jambes apprécièrent ce petit répit qui, toutefois, ne
dura pas, nouvelle montée et descente. Je sentais que j'approchais du laguna
mais, avant de pouvoir contempler ce beau lac et le sommet du Churup, il fallait
gravir une paroi rocheuse, assez escarpée où des cordes pendaient ici et là. À mi-chemin,
j'ai resté environ 1 minute à fixer la corde et à me demander par où je devais
passer ! Ça m'a donné une petite idée que je pourrais aimer l'escalade de
roches et franchement même s'il fallait user de prudence, j'ai adoré l'expérience
!
Une jolie chute m'accueillit ensuite mais ce n’était pas encore le moment
d’avoir ma récompense... Mes jambes commencèrent à être fatiguées : le dernier effort fut pénible mais voilà enfin que j'aperçus la pancarte. J'y étais, le laguna Churup (4 450 m), m'offrit toute sa beauté naturelle, entouré de sommets où mon regard prenait un pur plaisir à se perdre. Je savourais ce moment, noix à la main, musique d'ambiance smooth de Dj Tiesto et je pensai : " ça, c'est du bonheur, c'est de la chance, c'est la vie ! " Je redescendis, Dj Tiesto m'accompagnant toujours, mes pieds sautillant allègrement mais toutes ces roches me ralentirent et je glissai quelques fois : mes bâtons me manquèrent !
Ensuite, ce fut l'heure d'aller acheter quelques souvenirs. Le lendemain était
une journée tranquille : départ pour Chiquìan, le village de Lina, ma
guide. Mardi matin : l'aventure dans la Cordillera Huayhuash débuta… !
Cordillera Huayhuash : ardue mais si spectaculaire !!!
En bref, cela se résume à environ 150 km de marche sans portage en 10 jours, 9
nuits (incluant 1 journée de repos) en camping sauvage dans le nord du Pérou,
pris en charge (tentes, matelas, repas et cheval d’urgence fournis) par Lina,
guide certifiée et sa famille, qui connaissent les moindres recoins de cette
chaîne de montagnes où le père y a travaillé toute sa vie. Celui-ci ayant
transmis ainsi tout son savoir à sa fille, cette amoureuse des montagnes, de la
flore et la faune de sa région. Amour que je partage maintenant ! Certains
jours, Lina nous amenait, moi et mes 2 nouveaux amis, à des endroits où nous étions
seuls face à des décors incroyables. Lacs glaciaires variant du bleu turquoise
au vert, eaux thermales en pleine nature, vue sur des sommets enneigés de + de
6 000 m, cols assez ardus variant entre 4 500 m et 5 150 m, nuits froides et
parfois humides, des vallées d'une profondeur infinie, des anecdotes racontées
lors de l’heure du thé de fin d’après-midi et au souper se transformant
maintenant en souvenirs riches, inespérés et bien sûr, inoubliables !
Version plus détaillée maintenant, un peu longue j’en conviens mais il y a tant
à dire de ce magnifique périple !
Cette chaîne de montagnes s'étendant sur 30 km n'a rien à envier aux autres. Le
trekkeur s'y aventurant doit demeurer averti que ce ne sera pas toujours facile
: les vues spectaculaires offertes à lui se méritent. À chacun des campements,
des frais sont demandés par les communautés. N'étant pas réglementés, les prix
varient ici et là. Au total, il en coûte environ 210 soles (78$). Lors d'un paiement, un coupon vous est remis. À faire attention que ce coupon vous soit
bien remis car certains tentent d'arnaquer les touristes en demandant des
sommes alors qu’ils n’y sont pas autorisés. À chaque jour, nous nous levions
vers 6:00, thé de coca pour bien nous réveiller, déjeuner et départ vers 7:15. La
température fut plutôt bien. De beaux ciels bleus les matins et parfois du
temps gris et de la pluie, bien souvent lorsque la journée de marche était
terminée. À chaque jour, nous montions un col comportant une certaine
difficulté, tantôt abrupte, tantôt graduelle mais longue. Lina nous faisait
monter ici et là, au travers de chemins qui n’étaient pas tracés pour ainsi nous
amener à des points de vue sur les montagnes qu'elle chérit tant. C’était des
journées d'environ 5-6h de marche mais certaines pouvaient être plus longues,
allant jusqu'à 7h30-8h. Les sentiers variaient beaucoup (comme vous pourrez le
constater sur les photos) : certains en terre battue, d’autres plutôt
gazonnés ou en roches, de toutes les grosseurs dépendamment si nous marchions
sur un sentier de randonneurs, de bétails ou encore, sur une moraine. Après
18:15, le soleil disparaissait, le froid se présentait sournoisement. Celui-ci
ne m'a pas trop saisie vu que j’y étais préparée suite à mon trek au Népal. Le
vent se faisait parfois très cinglant. Au point culminant des cols Trapecio et
Jurau, j'en ai eu le souffle carrément coupé, impossible de respirer et de
rester stable. Toutefois, je rêvais éveillée par ce qui m'était offert après
tous ces efforts alors je prenais quelques secondes supplémentaires pour
retenir ma respiration et admirer.
Question de logistique, notre 1re journée se résuma à du transport pour se
rendre à notre 1er campement, à Cuartelwain (4 180 m) où un décor de hautes
montagnes se faisait déjà sentir. La 2e journée, nous commençâmes à marcher.
Cela se fit bien, souffle un peu court à certains moments jusqu’au col Cacanan
(4 700 m). En après-midi, nous arrêtâmes dans une source thermale naturelle où
nous fûmes seuls, tel que nous l’avait dit Lina. Nous continuâmes ensuite notre
chemin jusqu’au 2e campement, à Mitucocha dans une belle et large vallée. La 3e
journée fut plus longue et plus soutenue. Lina nous amena à un autre endroit où
nous fûmes seuls, encore une fois, à contempler les montagnes. 3e nuit près du
lac Carhuacocha avec vue imprenable sur le Siulà, le Yerupaja, le Rondoy et le
Jirishanca. La 4e journée fut assez longue également : nous contournâmes le
lac, nous remontâmes une vallée suivie d’un sentier plus escarpé, pour un 1er
point de vue, descente et remontée pour continuer notre chemin où se dressèrent
3 lacs de différentes couleurs offrant un spectacle magique. Nous continuâmes
pour arriver au col Siulà : un bon défi se terminant ensuite dans une large
vallée verdoyante qui étonna et nous transporta, l’espace de quelques
kilomètres, directement en Islande. Nous campâmes à Huayhuash. La 5e journée en
fut une autre exigeante en direction du col de Trapecio (5 010 m) avec vue sur
le glacier Nevado Trapecio qui sera tout près de nous. Des vues spectaculaires
à nouveau, souffle coupé et descente assez vertigineuse suite à la montée du
col. Difficile de garder les yeux à terre pour éviter une chute avec cette vue
imprenable sur l’impressionnant Nevado Puscanturpa. Dodo à Cuyoc. Cette 5e
journée fut un point fort mais la suivante aussi je l’attendais pour l’avoir
changée dans mon itinéraire ! La journée était belle et prometteuse. Une journée
de 8-9h de marche était prévue vers le col Jurau. La plupart des gens passaient plutôt par le col San Antonio, moi j’avais eu écho que Jurau était plus beau,
plus long et moins escarpé. Mes 2 compagnons décidèrent de prendre la voie
utilisée par les ânes alors je fus seule avec Lina. Une montée graduelle de 2h
se fit relativement bien jusqu'au col (5 100 m). Descente près du lac Jurau
suivie par cette vallée profonde où nous suivait une petite rivière… Au total
7h30 de marche à un bon rythme, un point de vue magnifique et une joie
inégalée.
Les choses se gâtèrent ensuite car je fis une solide indigestion alimentaire.
Suite à cette fabuleuse journée, arrivée au camp de Huayllapa (seul endroit où
nous fûmes dans un village avec possibilité d’acheter des trucs), j’étais
affamée et assoiffée... je me suis lancée dans la nourriture que Sabino, cuisinier et père
de Lina, avait préparée et j'achetai un gatorade rouge "péruvien"... Mauvais mélange, surtout qu'avant mon départ, j’avais coupé dans les gras et les
sucres alors mon estomac a réagi à tous ces changements... (il faut ajouter aussi que j’ai pris des médicaments de tous
genres pour couper un petit rhume). Le 7e jour, j'ai donc fait ma journée sur
le cheval de secours, m'ayant levée malade, sans force, incapable de déjeuner,
le cœur toujours au bord des lèvres. Yeux semi-ouverts sur le cheval, le
sentier ne finissait plus de monter et monter et monter... Je pensais à mes 2
compagnons qui étaient en train de marcher et j'en étais découragée pour eux ! Une fois arrivée en haut du col
Tapush, c'était maintenant plat mais… où était dont la fin ? Une journée qui sembla bien pénible pour mes compagnons qui arrivèrent au camp vers 17h45, alors que de mon
côté, j'essayais de faire la paix avec la fête improvisée dans mon estomac en
me reposant dans ma tente. Le 8e jour, mon estomac me laissa un peu de répit
mais aussitôt que le sentier se mit à monter, mes jambes ressemblèrent à deux énormes blocs de béton. De peine et de misère, j'arrivai à me déplacer. Est-ce le
résultat d'une journée à cheval ? D’une journée sans trop avoir mangé ?
Difficile à dire, fort probablement les deux mais ce fut une journée pénible où
tous commencèrent à ressentir la fatigue des derniers jours. Je dus faire une autre partie sur le cheval d'un autre groupe de randonneurs. Cette fatigue m'enleva même un peu de plaisir malgré un sentier de crêtes et une vue vers
notre campement près du lac Jahuacocha. C'est sur les airs de Dépêche Mode que
je trouvai l'énergie nécessaire pour avancer et me rendre au camp.
Le 9e jour
du trek fut une journée de repos où j'en profitai pour me reposer et tenter de
faire la paix avec tous mes bobos. J'avais maintenant un nouvel ami ou enfin, un petit flirt, qui a bien pris soin de moi ! Nous avons également eu droit à un repas
typiquement péruvien ce jour là : la pachamanca, soit différentes viandes cuites avec une variété de patates (différentes couleurs, goûts et textures !) et épices, sous terre, à l’aide de pierres chauffantes recouvertes de branches
et de sable. Malgré mon estomac fragile, je ne pouvais pas, ne pas goûter à ce
plat traditionnel. Au dernier jour, la levée du corps se fit à 4:30 afin
d’arriver à temps pour prendre le bus à Llamac, village où tout se terminait. Le terrain était plat, avec vue plongeante sur les vallées. Le rythme était
rapide, j'avais encore des pincements désagréables dans l'estomac mais je
conditionnai mon esprit, avec le support et les encouragements de mes
compagnons. Après 3:30 sur un terrain assez constant et plat, voilà que
s'amorca la descente, pendant 1 heure, jusqu'au village... Au village... Au
vil-la-geeeee… Oh ouiiiii... Je repris le rythme, je sentais la fin approcher et malgré
que j'y avais vu les plus beaux paysages de ma vie, mon mental et mon corps
avaient maintenant besoin d'une trêve. Voilà ce fut la fin : petit regain
d'énergie même si le ventre gazouillait encore. Dans le bus, je regardai mes
photos, j'en fus émue, une larme à l’œil (et je le suis encore en peaufinant ce récit...) Ce fut difficile, pénible même par
moments mais j’étais subjuguée par mes photos, me disant que j'avais passé au
travers et bien que cette Cordillera ne soit pas facile avec qui veut bien
fouler ses sentiers, celle-ci m'avait offert beaucoup : elle m'avait offert les décors les plus majestueux et variés de ma vie !
Les 2 dernières journées furent passées à Huaraz, avec mes nouveaux amis. Même si nous avions été ensemble durant les 10 jours précédents, nous profitions des derniers moments : derniers moments où l'envie de revenir au Québec n'y était pas... Karina, Grégoire, Lina, Éric, Sabino : merci pour cette belle aventure, pour ce coup de foudre... Je pense toujours à vous !
Je pourrais continuer avec les essentiels à avoir avec soi et les anecdotes
mais je vais arrêter ici pour le moment en partageant cette anecdote qui me
définit maintenant…
Nuit à Huayhuash, nous sommes quelques groupes et les chiens accompagnant les
groupes jappent et jappent, ils font un concours on dirait. Merde, je n’ai pas
amené de bouchons… ! Je mets alors du Moby pour atténuer les jappements et me
reposer. Fidèle à moi-même, je dois me lever pour aller aux toilettes. 3h30 du
matin, le ciel étoilé est grandiose, féerique, je suis renversée... Mon lecteur mp3 toujours aux
oreilles, je change de musique, je mets quelque chose de plus rythmé et là, je me mets à
danser... je me sens vivante, pleine d’énergie, choyée, large sourire aux lèvres. Et là, je me dis : « je suis définitivement une fille de hautes
montagnes ! »
Voici mon lien photos:
Hasta luego !